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 2005-2025 : Vingt ans après, les pratiques du pouvoir envers les magistrats tunisiens restent les mêmes 

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Des juges se rassemblent sur les marches du Palais de Justice lors d'une manifestation contre le président tunisien Kais Saied à Tunis, Tunisie, jeudi 23 juin 2022. Les avocats et les juges tunisiens ont organisé une petite manifestation devant les tribunaux de la capitale mercredi, dans le cadre de leur grève d'une semaine à la suite de la révocation de 57 juges par le président.

Le Bureau exécutif de l’Association des magistrats tunisiens a révélé, dans un communiqué daté du 18 janvier 2025, un incident survenu au siège de l’association, situé au Palais de justice de Tunis. Une représentante du parquet, accompagnée d’un agent de sécurité, s’est présentée lors d’une réunion du bureau et a exigé l’arrêt immédiat de la séance ainsi que l’évacuation des lieux. Selon le communiqué, cette intervention s’est faite sur ordre du procureur de la République près le tribunal de première instance de Tunis, qui a tenu les membres du bureau pour responsables de ne pas avoir respecté ses instructions. La représentante du parquet a justifié cette décision en invoquant le fait que la réunion se tenait un week-end, période durant laquelle le Palais de justice est fermé au public.

L’Association a vivement condamné cet incident, le qualifiant de « précédent grave » portant atteinte à son droit à se réunir librement. Elle a rappelé que son siège, situé au deuxième étage du Palais de justice, est un espace officiellement reconnu depuis 1946, symbolisant l’indépendance et l’autonomie historique des magistrats tunisiens. Ce lieu, bien que modeste, revêt une importance symbolique forte, rappelant les luttes passées pour préserver l’indépendance de la justice.

Un contexte politique tendu

Jusqu’à présent, les autorités s’étaient abstenues d’interférer dans les activités de l’Association, que ce soit en fixant des horaires de réunion ou en limitant l’accès à son siège. Cependant, cette décision du procureur de la République marque un tournant, suscitant des inquiétudes quant à une possible volonté de restreindre l’indépendance de l’Association. Cette dernière s’est distinguée ces dernières années par ses prises de position critiques contre l’ingérence du pouvoir politique dans le système judiciaire.

Certains observateurs craignent que cet incident ne soit le prélude à de nouvelles restrictions, rappelant les pratiques autoritaires d’avant la révolution de 2011. En 2005, l’Association avait déjà été confrontée à une tentative de prise de contrôle de son siège par des factions proches du pouvoir, un épisode qui s’était soldé par l’expulsion de son bureau légitime. Ce n’est qu’après la révolution que les magistrats avaient réussi à récupérer leur siège et à rétablir leur indépendance.

Des craintes pour l’avenir

Cet incident survient dans un contexte judiciaire tendu, marqué par des procès à venir impliquant des figures politiques de l’opposition. Les magistrats redoutent que ces restrictions ne compromettent les garanties d’un procès équitable, un pilier essentiel de l’État de droit. L’Association des magistrats tunisiens appelle à la vigilance face à ce qu’elle considère comme une menace pour l’indépendance de la justice et les acquis démocratiques.

La situation actuelle rappelle les conclusions d’une étude comparative publiée en 2016 par La Mémoire juridique, qui analysait les conditions des magistrats en Tunisie et en Égypte avant les révolutions arabes. L’étude mettait en lumière les pressions exercées sur les magistrats tunisiens en 2005, une période sombre que beaucoup espéraient révolue.

En somme, cet incident soulève des questions cruciales sur l’avenir de l’indépendance judiciaire en Tunisie, dans un contexte où les tensions politiques et les enjeux démocratiques restent plus que jamais d’actualité.

Le parquet de Tunis contredit l’Association des magistrats

De son côté, le parquet de Tunis a publié un communiqué dans lequel il conteste la version des faits rapportée par l’Association des magistrats. Il nie avoir exigé l’évacuation des lieux, affirmant avoir simplement demandé à l’Association de « respecter les procédures en vigueur, particulièrement en dehors des jours de travail, en signalant ses activités à l’avance ». Cette déclaration vise à clarifier la position du parquet, tout en maintenant que l’incident relève d’une question de conformité administrative plutôt que d’une volonté de restreindre les activités de l’Association

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