Politique
Tunisie : Kaïs Saïed, un président sur le chemin de la dictature cinq ans après son élection
Élu démocratiquement en octobre 2019 sur la promesse de réformer un système jugé inefficace et corrompu, le président tunisien Kaïs Saïed a progressivement accaparé tous les pouvoirs depuis son coup de force de juillet 2021. Cinq ans après son élection, les observateurs dénoncent un retour à la dictature, assimilant le chef de l’État à un nouveau Ben Ali.
La présidentialisation du régime
Le 25 juillet 2021, Kaïs Saïed gèle les travaux du Parlement et limoge le Premier ministre, invoquant le blocage des institutions. Depuis la révolution de 2011, le régime parlementaire n’arrive pas à accoucher d’une majorité claire, avec onze gouvernements qui se succèdent en 10 ans. Le président promet alors de rationaliser le système, soutenu par des milliers de Tunisiens et une grande partie de la société civile.
Mais deux mois plus tard, Kaïs Saïed passe des décrets lui accordant quasiment les pleins pouvoirs. Dans la nouvelle constitution ratifiée un an plus tard, la présidentialisation du régime est actée : la justice n’est plus un pouvoir mais une simple fonction, le gouvernement peut muter les juges à sa guise, et les partis politiques sont interdits de faire campagne, quand leurs bureaux ne sont pas fermés comme pour Ennahdha, la formation islamiste qui était le premier parti du pays avant le coup de force de 2021.
La répression des opposants
Face à cette dérive autoritaire, l’opposition a du mal à s’organiser. Un Front du Salut national regroupe des islamistes, des libéraux et des militants de gauche, mais il est difficile pour ce front d’avoir une stratégie cohérente. La société civile, très forte en Tunisie, a également du mal à se réorganiser, entre activistes désabusés et exilés.
La répression s’abat sur les opposants politiques, journalistes, militants des droits de l’homme. Des décrets présidentiels permettent d’arrêter quiconque pour la moindre critique du pouvoir. Les principaux chefs politiques sont actuellement en prison, certains depuis plus de 18 mois sans date de procès. Le complot, de préférence venu de l’étranger, est le maître-mot du régime pour justifier ces arrestations.
Une participation électorale en baisses
Financièrement, les familles tunisiennes peinent à boucler les fins de mois, avec une inflation galopante et des pénuries récurrentes de produits alimentaires subventionnés. La grande confiance dont bénéficiait Kaïs Saïed commence à s’éroder.
Lors des deux précédents scrutins, des élections législatives et locales, la participation avait tourné autour de 12%. L’enjeu principal de l’élection présidentielle de 2024 sera donc le chiffre de la participation, dans un contexte de désenchantement de la population.
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