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Tunisie : Vives tensions autour du procès à distance dans « l’affaire du complot »

Tunis, vendredi 11 avril 2025
Ce vendredi matin s’est tenue, devant le tribunal de première instance de Tunis, la deuxième audience du procès des détenus dans ce qui est médiatiquement appelé « l’affaire du complot contre la sûreté de l’État ». Une audience marquée par un dispositif sécuritaire renforcé et la tenue, une nouvelle fois, d’une comparution à distance des accusés , une décision vivement contestée par les familles, la défense et les organisations de défense des droits humains, qui y voient une violation des garanties d’un procès équitable.
Familles bloquées, tensions devant le tribunal

Comme lors de la première audience du 4 mars dernier, les forces de l’ordre ont empêché la plupart des familles des détenus d’accéder à l’enceinte du tribunal situé à Bab Bnet, n’autorisant qu’un nombre restreint de proches à assister à l’audience. Cette mesure a provoqué des tensions, avec une manifestation spontanée de protestation organisée devant le tribunal par des proches et des militants, dénonçant une « justice déshumanisée » et une « procédure biaisée ».
Les autorités justifient le recours à la comparution à distance pour des « raisons de sécurité », mais les avocats de la défense et les ONG y voient plutôt une manœuvre pour « limiter la pression médiatique et affaiblir les droits de la défense ». Les accusés, privés de contact physique avec leurs conseils durant les audiences, se retrouvent dans une situation désavantageuse, selon plusieurs observateurs juridiques.

Grève de la faim et inquiétudes pour la santé des détenus
Cette audience se tient dans un contexte de mobilisation accrue des détenus, qui ont entamé une grève de la faim collective pour protester contre leur détention prolongée et le refus des autorités de les faire comparaître physiquement. L’avocat et militant Jaouhar Ben Mbarek, l’une des figures emblématiques de cette affaire, a entamé son jeûne le 30 mars dernier, suivi par les autres détenus.
Dans un communiqué, Amnesty International Tunisie a exprimé sa « profonde inquiétude » face à la dégradation de leur état de santé, appelant les autorités tunisiennes à « garantir leurs droits fondamentaux » et à « mettre fin à leur détention arbitraire ». L’organisation dénonce également l’absence de preuves tangibles dans le dossier, qualifiant les charges de « vagues et infondées ».

Une affaire aux relents politiques
Depuis son ouverture, cette affaire suscite la controverse, de nombreux observateurs dénonçant une instrumentalisation politique de la justice. Les accusations de « complot » reposeraient sur des éléments fragiles, selon les avocats de la défense, qui déplorent également des irrégularités procédurales.
La décision de juger les accusés à distance, contre leur gré, ajoute une nouvelle couche à la polémique. Pour Me. Youssef, l’un des avocats de la défense, « cette procédure bafoue le droit à une défense pleine et entière », rappelant que les conventions internationales garantissent le droit à un procès équitable, incluant la présence physique de l’accusé.

Quelle issue possible
Alors que la grève de la faim des détenus entre dans son deuxième semaine, la pression monte sur les autorités tunisiennes. Les appels se multiplient, tant localement qu’à l’international, pour une révision de la procédure et une libération des détenus, dont la détention est jugée « arbitraire » par plusieurs ONG.
Dans l’immédiat, tous les regards sont tournés vers l’évolution de l’état de santé des grévistes, tandis que le débat sur l’indépendance de la justice tunisienne continue de faire rage. Cette affaire, au-delà des enjeux judiciaires, pose une question fondamentale : la Tunisie respecte-t-elle encore ses engagements en matière de droits humains et d’État de droit ?
Publiée par قناة الزيتونة sur Vendredi 11 avril 2025

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