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Politique

Tunisie : Des universitaires dénoncent un simulacre de justice dans l’affaire du « complot contre la sûreté de l’État »

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pénombre d’un tribunal d’exception, quarante voix ont été étouffées à l’aube du 19 avril. Quarante condamnations, allant jusqu’à soixante-six ans de prison, prononcées par la cinquième chambre criminelle du pôle judiciaire anti-terrorisme. Une parodie de justice, dénoncée par une cinquantaine de professeurs de droit tunisiens, parmi lesquels des figures éminentes comme les professeurs Slim Laghmani, Iyadh Ben Achour, Naila Chabaan ou encore Rida Jenih. 

Un procès sans procès
« Ces verdicts sont des actes d’accusation contre la justice elle-même », lance d’emblée le Pr. Naji Bkouch, ancien doyen de la faculté de droit de Sfax. La pétition, signée par des juristes de Tunis, Sousse, Sfax ou encore Jendouba, dresse un réquisitoire accablant : des prévenus détenus arbitrairement depuis deux ans, des audiences à huis clos, des avocats empêchés de plaider, des juges dont l’impartialité a été contestée sans suite. 

« Où sont les preuves ? Où est la confrontation des témoignages ? », interroge la Pr. Lamia Naji, voix tremblante d’indignation. Les chefs d’accusation, flous, n’ont même pas été communiqués aux accusés, selon les signataires. Certains n’ont été entendus qu’une seule fois en deux ans. D’autres ont subi des conditions de détention « cruelles et inhumaines », en violation des principes Nelson Mandela sur les droits des détenus politiques. 

La justice instrumentalisée ?
Pour ces universitaires, cette affaire dépasse les quarante prévenus. Elle symbolise l’effritement de l’État de droit depuis le 25 juillet 2021. « On utilise des lois d’exception pour criminaliser l’opposition et museler la liberté d’expression », dénonce le Pr. Sami El Jorbi. La pétition pointe aussi la mainmise du pouvoir sur le judiciaire : le magistrat instructeur aurait été nommé illégalement, en contournant le Conseil supérieur de la magistrature. 

Les familles des condamnés, présentes lors de la lecture du verdict, racontent une parodie de procès. « Mon frère n’a même pas pu parler. Les juges ont tranché en quinze minutes », témoigne Khadija*, sœur d’un accusé. 

Un appel à l’espoir
Malgré l’amertume, les signataires espèrent un sursaut en appel. « La présomption d’innocence doit reprendre ses droits », plaide la Pr. Fadwa Masmoudi. Mais dans un climat où les critiques sont assimilées à des « atteintes à la sûreté de l’État », leur voix risque-t-elle d’être étouffée à son tour ? 

En attendant, cette mobilisation inédite de la communauté juridique tunisienne rappelle une évidence : sans justice indépendante, il n’y a pas de démocratie possible. 

*Le prénom a été modifié pour protéger l’anonymat de la famille.* 

**Signataires éminents de la pétition :** 
– Iyadh Ben Achour (ancien doyen, faculté de droit de Tunis) 
– Naila Chabaan (ancienne doyenne, faculté de droit de Tunis) 
– Rida Jenih (professeur émérite, faculté de droit de Sousse) 
– Wahid Ferchichi (doyen en exercice, faculté de droit de Tunis) 
– Et plus de 40 autres universitaires. 

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